Quitter la Russie et arriver en Chine, une journée marathon.
Du 30 Novembre au 1er Décembre.
Par Sophie – Du 15 au 19 avril – 4 jours marathons au prise avec l’administration Lao pour faire renouveler mon visa.
Ce vendredi 30 novembre 2018, j’ai la pression. Levée à 3 heures du matin, il faut que je traverse la frontière Chinoise et que je quitte la Russie dans la journée. Et comme la frontière ferme aux alentours de 18h (ça dépend surtout de l’humeur des hommes politiques et des tensions entre la Chine et la Russie), ça me laisse 14 heures pour partir de Vladivostok et arriver à passer la frontière.
Mon bus part donc d’un point de départ dans la ville (et pas de la gare routière, ça aurait été trop facile…). En regardant la veille avec la fille de la réception, qui m’a vraiment bien aidée, on a conclu qu’il fallait qu’un taxi me récupère à l’auberge à 4 heures du matin pour mon bus à 5h30, pour prendre un peu de marge au cas où il y ait un problème sur le trajet estimé à 45 minutes.
Finalement, le taxi est arrivé à 4h et m’a déposée à l’endroit prévu 15 minutes plus tard avec donc 1 heure et 15 minutes d’avance. Je me suis pelée les miches dans la nuit à un arrêt de bus un peu glauque jusqu’à ce que le bus se pointe à 4h45 et qu’on nous fasse monter dedans. 45 minutes d’avance pour le bus, ça m’a paru un peu bizarre, mais personne ne m’a demandé mon ticket et comme le numéro du bus correspondait à celui sur mon billet, je me suis pas inquiétée et je suis allée me mettre au chaud.
Les choses ont commencé à devenir encore plus surprenantes quand le bus est parti, quasiment vide, à 5h du matin (au lieu de 5h30 sur mon billet) et à récupérer des gens en chemin. Histoire d’être sûre que je ne m’étais pas trompée de bus, je suis allée demander si on allait bien à Hunchun au jeune couple assis à quelques sièges de moi. Ils ont à peine eu le temps de me répondre oui qu’une dame à l’avant du bus s’est mise à me hurler dessus dans un mélange de russe et d’anglais. J’ai compris qu’il fallait que je me rassoie, ce que j’ai fait, plus ou moins rassurée.
J’ai fini par m’endormir alors que le bus continuait sa tournée et récupérait des gens en chemin jusqu’à être totalement plein. Tellement plein que la dernière personne qui est montée dans le bus n’a pas trouvé de place, à la surprise générale. Mais comme personne n’est venu me demander mon billet et que personne n’avait essayé de m’appeler après l’heure de départ théorique de mon bus, j’ai arrêté de m’inquiéter et je me suis rendormie, non sans avoir salué ma voisine de siège, Angela.
Finalement, le soleil s’est levé et j’ai commencé à émerger de cette fin de nuit agitée.
Le temps de faire plus ample connaissance avec ma voisine, par Google Trad interposé, on est finalement arrivé à la ville la plus proche de la frontière, côté russe, où un deuxième bus nous a rejoint.
Les responsables des deux bus sont descendues et ont commencé à discuter. Après quelques minutes, elles sont remontées chacune dans leur bus et la responsable du mien, qui n’est autre que la dame qui m’avait hurlée dessus à 5h du matin quand j’ai voulu m’assurer que j’étais dans le bon bus, est venue me voir et m’a demandé mon billet (il était temps vous me direz).
Verdict ?
Je me suis bien trompée de bus 🙃 !
J’aurais dû monter dans le 2ème bus affrété qui lui est bien partit à 5h30, sans moi donc. Voilà qui explique pourquoi il manquait une place dans mon bus. Finalement, on m’a dit de rester là où j’étais et c’est Angela qui m’a expliqué le fin mot de l’histoire. Autant vous dire que ça l’a bien fait marrer, tout comme le reste du bus d’ailleurs.
Puis on s’est arrêté à un 1er check point où un militaire est entré dans le bus, a compté tout le monde en vérifiant les passeports au passage avant de redescendre et d’ouvrir la barrière. On est donc entré dans le no-man’s-land entre la Russie et la Chine. No-man’s-land où, comme son nom l’indique, personne n’a le droit de se balader, mais où on ne peut pas prendre de photos non plus.
Ne le sachant pas, j’ai voulu prendre en photo un arbre en fleur (assez étonnant en ce 30 novembre). Angela s’est alors jetée sur mon téléphone en me répétant No, No, No… et en regardant vers l’avant du bus. Ce qui m’a permis de comprendre que la dame pas toujours aimable de l’avant du bus n’était pas là uniquement pour organiser le passage de la frontière, mais aussi pour surveiller tout ce petit monde. Sympa l’ambiance…
Puis on est arrivé à un deuxième check point où une militaire est montée dans le bus, nous a compté (j’imagine au cas où quelqu’un aurait eu une envie pressante et profité de la pause pour disparaître dans la nature), et a vérifié les passeports. Elle a aussi fait payer 300 roubles à toutes les personnes qui n’avaient pas de passeport russe (dont moi).
On est repartit pour quelques minutes de route avant d’atteindre un nouveau check point où on nous a fait descendre du bus, récupérer nos sacs (le bus ne pouvant quitter la Russie que vide) et entrer dans le poste frontière proprement dit.
Pour ceux qui se demandent où il est, cherchez le point bleu !
Là on nous a fait mettre en ligne et passer un par un devant les agents de l’immigration qui ont tamponnés les passeports. La dame, assez aimable qui m’a tamponnée le mien m’a bien expliqué, en anglais, que je quittai le territoire russe et que je ne pouvais en aucun cas revenir, sauf si j’obtenais un nouveau visa. Elle s’est également assurée que j’avais bien un visa valide pour la Chine.
Le message ?
« Ne te fais pas refouler de Chine, t’auras pas le droit de revenir en Russie de toute façon. »
« Yes Madam! »
Une fois tout le monde remonté dans le bus (et les valises rechargées), un militaire a contrôlé nos passeports (et oui, encore un coup), compté le nombre de personnes dans le bus (ils doivent se convertir dans l’encadrement de sorties scolaires à la fin de leur carrière militaire) et nous sommes repartis pour 20 bonnes minutes de route, plus en Russie, et pas encore en Chine. Je me suis toujours demandée comment les assurances fonctionnaient en cas d’accident dans une de ces zones internationales.
Heureusement, en l’absence de problème sur la route, on a atteint le poste frontière chinois. Et là on change un peu d’univers. J’ai pas vraiment réussi à comprendre ce que les chinois ont à prouver mais leur poste frontière était grand, moderne, équipé des dernières technologies pour scanner les bagages, prendre les empreintes digitales… Rien à voir avec la cabane de chasseurs reconvertie en poste frontière côté russe.
Cela dit, un militaire (chinois cette fois-ci) est entré dans le bus, a contrôlé tous les passeports et compté le nombre de personne dans le bus. Jusque là tout allait bien, puis quand il est repassé dans le couloir pour sortir du bus, il s’est arrêté au niveau de mon siège et m’a redemandé mon passeport qu’il a regardé sous toutes les coutures en répétant « Faguo… » (français, ou France j’ai jamais trop su, en chinois). Alors soit il n’a pas souvent l’occasion de voir des passeports autres que russes et chinois, soit il y a eu une crise entre la France et la Chine dans la nuit et je vais avoir des problèmes.
Heureusement pour la suite de mon voyage, la 1ère explication était la bonne. Une fois le check point passé, nous avons pu récupérer nos sacs et entrer dans le hall avec les agents de l’immigration. Là le chef d’équipe (en tout cas il avait l’air d’être le chef au vu des décorations diverses sur son uniforme) est venu me voir et m’a demandé mon passeport qui a passé les 5 minutes suivantes à passer de mains en mains et à se faire examiner sous toutes les coutures par les trois quarts des agents de l’immigration présents. J’ai presque vu le moment où j’allais devoir faire un selfi avec toute l’équipe des douanes chinoises 😆!
Finalement, et non sans galérer un peu pour la prise d’empreintes digitales, j’ai pu passer de l’autre côté de la barrière et entrer en Chine. Le temps d’un dernier comptage et vérification des passeports, le bus est repartit direction Hunchun, qu’on a atteint une petite heure plus tard.
Une fois à Hunchun, le bus m’a déposé quelque part en ville et les restrictions d’internet en Chine sont tout à coup devenues beaucoup plus concrètes. Google n’y fonctionne pas sans VPN et même si la carte est déjà chargée et l’itinéraire enregistré, la localisation fournie par le GPS n’est pas bonne (en tout cas n’était pas bonne à Hunchun). Du coup j’ai un peu galéré à trouver mon hôtel. Une fois dans la bonne rue, je me suis retrouvée à comparer les façades de chaque bâtiment avant de trouver celle qui correspondait à la photo de ma réservation booking.
Parce que autant j’avais réussi à me faire au Russe et à déchiffrer les devantures pour trouver des hôtels/auberges de jeunesse, cafés et restaurants après une dizaine de jours, autant vous dire que le chinois et les spaghettis sur tous les panneaux, ça rend les choses nettement plus difficiles.
Une fois installée dans ma chambre privée, j’ai même dû m’enregistrer moi même à la réception, la dame qui s’occupe de l’hôtel ne parlant tellement pas anglais qu’elle n’a pas pu déchiffrer mon passeport pour m’enregistrer (véridique…), je suis allée me balader en ville.
Pour ceux qui connaissent, Hunchun m’a un peu fait penser au Pas de la Case en Andorre. En fait la ville entière est un gigantesque centre commercial. La principale différence c’est que tout est écrit en chinois (avec quelques sous-titres en russes) et qu’on y trouve pas vraiment les mêmes produits.
Finalement, affamée par mes émotions frontalières de la journée, je suis allée m’installer dans un café pour manger.
1er moment de solitude quand on m’a tendu un menu en Chinois.
Heu… Vous auriez pas de l’anglais ?
Toute souriante, la fille m’a donc tendu un autre menu…
Ah…
En russe.
Heureusement qu’il y avait des photos.
Avant de partir je suis quand même allée leur demander où est la gare pour quitter la ville le lendemain. La responsable d’équipe parlait anglais, elle m’a donc très gentiment écrit des spaghettis sur un papier en me disant de montrer ça au chauffeur de taxi et que ça devrait marcher.
Merci 😀.
J’ai continué à me balader un peu en ville où je suis allée de surprises en surprises. Comme par exemple cette rue entière sponsorisée par une marque américaine, plutôt surprenant.
J’ai fini par trouver un parc avec une étendue d’eau où la balade était assez sympathique.
Au détour d’un chemin, tous mes repères durement acquis en Russie ont volé en éclat. Ici, plus de statue de Lénine… Mais de Mao !
Logique vous me direz.
Heureusement que l’architecture permet de se mettre dans le bain direct, la plupart des bâtiments ne laissent pas de place au doute : me voilà en Chine.
Le lendemain, après une nuit de sommeil assez humide et sans eau chaude pour la douche du matin, j’ai réussi à aller à la gare sans problème, le papier de la veille indiquant apparemment les bonnes informations. Et comme pour le poste frontière, la gare permet de se rendre compte de la différence entre la Chine et la Russie. Ici, on fait pas dans le charme des vieilles pierres et j’ai débarqué dans une gare toute neuve et super moderne.
Le moment de solitude (je ne vais pas les compter, on s’y perdrait) ? Quand il a fallut acheter le billet pour Changchun, ma destination suivante. Personne ne parlant un traître mot d’anglais, j’ai fini par choisir le billet le moins cher pour le train d’après. C’est en chemin que je me suis rendue compte que j’avais un ticket sans place assise. Je me suis donc fait virer des différents sièges que j’ai squattés les uns après les autres avant de finir le trajet debout entre deux wagons.
Heureusement que c’était pas très long, juste 3 heures de train au total.
En tout cas, me voilà en Chine et mes aventures et galères ne faisaient que commencer 😊.